« Le vin réjouit le cœur de l’homme
Jamais homme noble ne hait le bon vin. »
Rabelais (1494-1553)
« Rabelais, le plus grand et sérieux des humanistes français ; Angevin de naissance, ce qui explique la suite ; auteur de Pantagruel et de Gargantua, poèmes en prose de gueule et de beuverie, sans lesquels les mots « vin et bouteille » ( toujours vide ) n’auraient pas été mis à autant de sauces épicées du meilleur esprit français issu de la fameuse et annuelle « purée septembrale » Œuvres à lire quand on veut avoir faim et soif ou quand on est en mélancolie devant, par exemple, des impôts à payer. » (Extrait du « Glossaire Vineux du Docteur Eylaud ).
Le plus illustre des Chinonais Maître Rabelais, a inspiré nombre de confréries vineuses rien qu’en Anjou et Touraine : « Confrérie des Chevaliers du Sacavin d’Anjou » « Confrérie des Fins Gousiers d’Anjou » » Commanderie du Taste-Saumur » « Les Entonneurs Rabelaisiens Confrérie bachique de Chinon » « Confrérie des Fripe- Douzils D’ingrandes de Touraine » « Confrérie des Chevaliers des Cuers du Baril » « Confrérie des Chevaliers de la Chantepleure » « Coterie des Closiers de Montlouis » » Commanderie des Grands vins d’Amboise » « Confrérie des Compagnons de Grandgousier ». Qui n’a pas déjà entendu le fameux serment de Maître François Rabelais : « Quand mon verre sera plein, je le videray Et quand il sera vide, je le pleindray … ». À nos dévots œnophiles dispersés sur la toile planétaire je le rappelle, c’est dans ces attachantes confréries de la convivialité qu’il faut aller entendre le rire très fort de Maître Rabelais. On trouve en Anjou et Touraine sous le portrait du Maître François Rabelais, des fins palais et des amis du vin qui savent en toute chose « raison garder »
(Photo archive de l'auteur)
La Devinière, maison des champs du XVe siècle, est le lieu de naissance de François Rabelais. Elle est située à Seuilly, au cœur du vignoble du Chinonais, elle abrite un musée littéraire qui lui est consacré.
Ce qui ne manquera jamais de surprendre le lecteur de l’œuvre de Rabelais, c’est son style et sa langue. Tout y est mêlé, les expressions les plus populaires. Ce génie fabrique des mots tirés du latin et du grec. Il nous offre des scènes drôlatiqes, d’une richesse unique dans l’histoire de l’humanité. À force de référence des chansons et de littérature bachique au vocabulaire et à l’univers de Rabelais, le nom de cet écrivain suffit à évoquer la bonne chère. Les récits rabelaisiens sont des œuvres de maturité. D’abord moine
pendant vingt ans, Rabelais reprit l’étude du grec, de la médecine et de l’anatomie. Le curé de Meudon y révèle une solide conaissance des pratiques de table de son temps. Exemple : « l’appétit vient en mangeant ; la soif s’en va en buvant ». L’humour et la dérision autorisant tous les débordements. C’est ainsi que l’ingestion, la digestion et l’excrétion de nourriture en abondance, chez Rabelais médecin visitant ses patients : on trouve l’unique la, drôlatique et colorée expression « Qui bien mange, bien pète » ou « Qui bien pète, bien mange ». Rabelais médecin a laissé à Montpellier une véritable tradition : pas un médecin ne quitte la Faculté de médecine sans avoir prêté serment sous la « roble de Rabelais » Le jardin des plantes de Montpellier a immortalisé, sa statue. Mais mieux encore que les victuailles solides, c’est le vin qui se manifeste chez cet érudit Angevin. Est-il un nom et un lieu plus doux et plus évocateur ? La vocation céleste de ce morceau de Loire, aux ciels pastels, bleu bien tendre, Anjou affirmé dans ses vins légers, doux ou secs, toujours dépourvus d’acidité, « qui donnent du talent et valent, dit-on, une muse ». L’Anjou possède des vins « gouleyants » Rabelais les a chantés en ces termes :
« il n’est pas breuvage meilleur pour être en sang transformé, vous espanouir le cerveau, esbaudir les esprits amicaux, ouvrir l’appestit, resjouir le palais et mille autres rares advantaiges. » Au chapitre de l’oracle de la bouteille, Rabelais parle d’un « bien long ordre de flacons, bourraches, fioles, ferrières, barils, barreauls, homides, pots, pintes cymaises antiques pendant d’une treille ombrageuse », comme récipients pour boire du vin.
« L’odeur du vin , O combien est plus friant, riant priant, plus céleste, plus délicieuse que d’huile » L’œuvre de Rabelais, écrite sous le signe du vin, est à la fois philosophique et bachique.
Voilà comment sous le doux ciel bleu Angevin et Tourangeau en plein jardin de France où plane l’ombre de Maître François Rabelais, on cultive le plaisir de vivre pantagruelliquement avec art et manière. La cérémonie d’intronisation en bon françois du XVIe siècle ne manque ni de saveur ni de pittoresque. L’ambiance « toute de gayeté et bonne joyeuseté » est due au cadre, aux costumes et surtout au « chinonant breuvage ». Le Grand Maître rappelle à tous œnophile digne de ce nom, que justement « il n’est pas seulement question, quand il est question de vin, de boire beaucoup ni même de boire, mais de discerner entre ce qui se boit et ce qui ce déguste, ce qui s’avale et ce qui se goûte, ce qui est agréable et ce qui est délectable ». On y entend aussi en leurs caves troglodytiques. « Science ( gourmande ) sans conscience n’est que ruine de l’âme » « Nos rois l’on aimé. » « Les bons Chevaliers garderont santé par ce vin de taffetas qui chasse humeurs sales et lancinantes tout à l’aise du corps et au profit des reins, et enlève gravelle et aultres maladies de vessie…» « En gosier sec, jamais joie n’habite » « Beuvez toujours, vous ne mourrez jamais ». Les candidats qui prêtent serment dans la Confrérie des « Entonneurs Rabelaisiens Confrérie Bachique de Chinon » recoivent le Cordon Rouge et Or, auquel pend l’insigne de la Confrérie, une très belle médaille frappée à l’effigie du plus illustre des Chinonais.
La Dive Bouteille, de Rabelais
O Bouteille,
Pleine toute
De mystère,
D’une oreille
Je t’écoute :
Ne diffère,
Et le mot profère
Auquel pend mon cœur
En la tant divine liqueur,
Qui est dedans tes flancs reclose,
Bacchus, qui fut d’Inde vainqueur,
Tient toute vérité enclose.
Vin tant divin, loin de toi est forclose
Toute mensonge et toute tromperie.
En joie soit l’aire de Noach close,
Lequel de toi nous fit la tempérie.
Sonne le beau mot, je t’en prie,
Qui me doit ôter de misère.
Ainsi ne se perde une goutte
De toi, soit blanche ou soit vermeille.
No comments:
Post a Comment